Dermite séborrhéique et SIDA . 

Q-R 1

Q De quels traitements dispose-t-on pour traiter la dermite séborrhéique et les allergies cutanées ?

R Concernant l'allergie : les phénomènes allergiques sont plus fréquents chez les personnes séropositives que chez les personnes non infectées par le virus HIV. Cela ne traduit pas une faiblesse des défenses immunitaires. Certains chercheurs pensent que cela pourrait être secondaire à une exacerbation de la fabrication d'anticorps par le système immunitaire de certaines personnes. Cette allergie, étant favorisée par les carences en vitamine E, il est conseillé de prendre régulièrement de la vitamine E (Toco 500 : 3 comprimés par jour pendant plusieurs mois, remboursé Sécurité sociale). Ce traitement anodin est cependant contre-indiqué si le Taux de Prothrombine (TP) est inférieur à 75% (ce qui est rare). On recommande d'ailleurs de plus en plus cette vitamine pour tous les patients séropositifs en raison de son action sur des cofacteurs du virus HIV. Par ailleurs, il est conseillé d'associer (mais sur des périodes de 7 à 15 jours) des antihistaminiques (comme le Zyrtec : 1 comprimé par jour) pour agir plus précisément sur les démangeaisons.

Concernant la dermite séborrhéique, ce n'est pas non plus un témoin d'un risque d'évolution de l'infection à HIV. Il s'agit d'une manifestation cutanée souvent récidivante. Parfois le traitement de l'allergie permet de diminuer son intensité. On peut conseiller d'utiliser une préparation dermatologique ichtyolée à 1% : ichtyol à 5 g, glycérine à 5 g, alcool camphré 20g ou eau distillée 90 g, dermocuivre pommade : 1 tube, ichtyol 0,35 g ou Keluol émulsion matin et soir après nettoyage de la peau, en alternant avec des lotions antifongiques type Daktarin lotion.

En cas d'échec, on peut envisager l'application d'un corticoïde en évitant toute utilisation prolongée (en effet, ce traitement est parfois très efficace, mais il risque d'entraîner une dépendance) : Daktacort, une application matin et soir, ou Ketoderm crème, 2 applications par jour, Tridésonit, 2 à 3 applications par jour pendant au maximum un mois.

Certains médecins conseillent aussi des shampooings à base de goudron ou de pyrithione zinc, ou à base de disulfure de sélénium, et la crème au ketoconazole à 1%. (1097)


Q-R 2

Q Comment le Sida peut-il se manifester au niveau de la peau ?

R Votre question sur les signes cutanés du Sida est un vaste sujet.

Nous allons essayé de vous présenter une synthèse. Pour plus de précisions, nous vous conseillons de consulter F. ASPECTS MEDICAUX DU SIDA sur notre serveur Internet (<http://www.positifs.org/>).

1/ Concernant les signes cutanés pouvant apparaître au décours de la contamination par le virus VIH (primo-infection par le VIH), ils peuvent se déclarer cliniquement 15 jours à 3 mois après la contamination, chez 20 à 50% des patients infectés. L'aspect clinique est, dans ce cas, un syndrome mononucléosique analogue au syndrome viral de la grippe ou de la rubéole. Les signes sont, par ordre décroissant de fréquence : adénopathies (= ganglions) cervicales et axillaires (parfois splénomégalie), fièvre pouvant persister un mois, sueurs, asthénie intense - voire des malaises -, une anorexie, des courbatures, des myalgies, un rash cutané - voire urticairien -, une dysphagie douloureuse, des céphalées, des arthralgies, parfois une candidose avec ulcérations buccales. Ces symptômes disparaissent au bout de quelques semaines à un mois. Ces signes, totalement non spécifiques, doivent faire évoquer le VIH chez un sujet jeune, ayant des conduites à risque.

 

2/ Concernant les signes cutanés pouvant survenir au cours de l'infection à VIH

A. Les manifestations cutanées mineures sont fréquentes.

A.1. La dermite seborrhéique serait un signe précoce de l'infection à VIH. Elle se traduit par une desquamation sur fond erythrosique (= rouge) parfois limitée au nez, front, cuir chevelu ; parfois, localisation thoracique et aux zones riches en glandes sébacées. Les récidives sont fréquentes. Il semblerait qu'un champignon (Mallassezia furfur) favorise cette dermite. Sa fréquence est la suivante : 10% chez les asymptomatiques, 40% chez les ARC, 45 à 80% chez les SIDA.

A.2. Impétigo, folliculite, polydermite (staphylocoques, streptocoques). Les lésions eczématiformes avec tendance à l'impétiginisation sont fréquentes.

A.3. Candidoses buccales, génitales, péri-anales, onyxis (fréquent). Rappelons que chez certains patients (qu'ils soient d'ailleurs infectés ou non par le VIH), les mycoses sont favorisées par certains facteurs, médicamenteux en particulier. C'est le cas des antibiotiques et des antiseptiques du carrefour aérodigestif (nez, gorge, etc.) ; ce qui nécessite d'éviter les prescriptions injustifiées de ces traitements (notamment par automédication). C'est le cas aussi de l'hyperglycémie : diabète, intolérance simple aux hydrates de carbone - voire même l'absorption exagérée, transitoire, de certains sucres, des anémies ferriprives, de l'insuffisance thyroïdienne. Rappelons que la sécheresse buccale occasionnée par la prise de somnifères, tranquillisants, neuroleptiques et atrophiniques peut favoriser chez certains patients les mycoses buccales et, secondairement, les localisations intestinales et rectales.

A.4. Herpès buccal, génital ou péri-anal : il ne prend de signification que lorsque les rechutes deviennent plus fréquentes et la durée de la poussée plus longue. Il serait plus fréquent quand les lymphocytes T4 < 50/mm3 ou < 5%.

A.5. Le Molluscum contagiosum se traduit par une papule de 5 mm de diamètre ombiliquée, couleur peau saine, donnant l'impression d'une lentille posée sur la peau, localisée au visage. Son évolution se fait par poussées.

A.6. Les aphtes peuvent occasionner des ulcérations localisées au niveau de la cavité buccale, de l'oesophage, mais aussi au niveau génital.

A.7. Le prurit et le prurigo. Le prurigo se traduit par l'apparition répétée de lésions rouges, surmontées d'une vésicule, souvent localisées au niveau des jambes. Il est souvent très prurigineux. Parfois, il est secondaire à une folliculite dont le traitement peut améliorer le prurigo. Parfois, il est secondaire à une parasitose intestinale (helminthiase) dont le diagnostic repose sur l'examen parasitologique des selles. Plus rarement, il peut survenir en cas de lymphome.

A.8. Ichtyose, hyperkératose.

A.9. Les dermatophytoses (surtout aux stades ARC et SIDA) sont souvent associées aux mycoses. A.10. Le terrain allergique est plus fréquent chez le sujet infecté par le VIH que chez le sujet sain. Il est favorisé par la carence en vitamine E .

A.11. Les infections à papillomavirus. Elles peuvent être localisées au niveau du col de l'utérus, du vagin, de la vulve, du périnée, du canal anal, du pénis et de l'urètre. Les cancers ano-génitaux (notamment les lésions cancéreuses intra-épithéliales du col de l'utérus) associés à des papillomavirus étant plus fréquents chez les personnes infectées par le virus VIH, le diagnostic de ces infections est très important. Son diagnostic est confirmé par les frottis, la colposcopie ou l'anuscopie avec biopsies. Préventivement, il importe que les femmes séropositives fassent régulièrement des frottis cervico-vaginaux de dépistage ; au même titre que cela est conseillé pour toutes les femmes, mais avec une plus grande fréquence (tous les six mois).

 

B. Les manifestations cutanées majeures sont fréquentes.

B.1. La candidose oesophagienne, de par son retentissement, est une forme majeure.

B.2. La leucoplasie chevelue serait spécifique du VIH : il s'agit d'excroissances blanches striées, sur le bord latéral de la langue. La cause en serait l'EBV (Epstein-Barr virus) ou l'HPV (papillomavirus).

B.3. Sarcome de Kaposi : il s'agit d'une tumeur vasculaire qui a été découverte avant l'apparition de l'épidémie du SIDA. Chez les sujets non séropositifs, elle est rare, touchant souvent des patients de plus de 60 ans, donnant des localisations distales (membres inférieurs) avec une certaine fréquence en Europe de l'Est, Centrale, et le pourtour méditerranéen (populations d'origine juive), engageant rarement le pronostic vital. En Afrique, il existe à l'état endémique, surtout en Afrique équatoriale (Zaïre, Ouganda, Kenya), et se manifeste de façon plus agressive, touchant une population plus jeune et avec des localisations viscérales et ganglionnaires. Des sarcomes de Kaposi ont été décrits chez des patients transplantés recevant des traitements immunosuppresseurs. Ces formes sont à rapprocher de celles observées fréquemment en association avec des lymphomes. La forme la plus fréquente, actuellement, est celle observée au cours du SIDA. Il est particulièrement fréquent chez les homosexuels (21%), et plus rare chez les personnes des autres groupes "à risque" (moins de 3%). 80 à 90% des patients atteints sont homosexuels (quelques cas ont aussi été décrits chez des homosexuels non infectés par le VIH). Chez les femmes, il est rare (3,5%) ; cette fréquence est plus élevée en cas de partenaire bisexuel. Ce fut, au début de l'épidémie, la première manifestation du SIDA chez près de 40% des homosexuels ; depuis 1989, sa prévalence comme signe inaugural du Sida a diminué. Maintenant, il survient surtout à des stades plus avancés de la maladie, souvent chez des personnes ayant des CD4 inférieurs à 200/mm3, avec une plus grande fréquence des formes pulmonaires graves et des atteintes cutanées étendues avec oedèmes importants.

Plusieurs facteurs joueraient un rôle dans l'apparition du sarcome de Kaposi : l'herpès virus HHV8 (qui a été aussi retrouvé dans deux autres pathologies touchant les personnes séropositives : le lymphome BCBL et la maladie de Castelman), la protéine tat du VIH (qui agirait en synergie avec le bêta-FGF), des cytokines ou facteurs de croissance participant à la prolifération et à la différenciation cellulaire (dont l'activité serait stimulée par tat et qui sont synthétisées par les cellules du sarcome de Kaposi) comme le TNF alpha, l'interleukine 1, l'interleukine 6, le PDGF (Platelet Derived Growth Factor), le TGF bêta (Transforming Growth Factor), le bêta-FGF (Fibroblast Growth Factor Basic), l'oncostatin M.

Les symptômes du sarcome de Kaposi dans le cadre du SIDA :

Souvent, il s'agit d'une forme localisée, peu extensive à son début, dans 30% des cas : papule ou nodule infiltré rouge, violacé ou marron, évoluant vers des lésions en plaque parfois douloureuses ; souvent localisé aux extrémités, notamment plante des pieds, au début, puis sur toutes les parties du corps. Les atteintes muqueuses, notamment du palais dans plus de 50 % des cas, peuvent être inaugurales. Souvent le diagnostic est évident : la biopsie cutanée permet d'apporter le diagnostic histologique de certitude. Il existe des formes avec localisations viscérales multiples dans plus de 50% des cas, souvent associées à d'autres affections opportunistes : notamment pulmonaires ou digestives ; dans les formes très évoluées on peut noter un lympho-oedème de la face ou des membres inférieurs. Seules les formes pulmonaires, ou les exceptionnelles formes digestives hémorragiques, peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Des complications dues à certains traitements peuvent mettre aussi en jeu le pronostic vital. Le pronostic est aussi parfois modifié en raison des troubles de l'alimentation, secondaires à des atteintes buccales parfois importantes.

L'aspect histologique est très spécifique : la biopsie montre une prolifération angiomateuse et fibroblastique (cellules fusiformes "spindle cells") entrecoupée de fentes vasculaires et de dépôts d'hémosidérine.

Rappelons enfin qu'à l'occasion d'études rétrospectives pour analyser l'effet sur le Kaposi des trois antiviraux utilisés pour traiter l'herpès, certaines études ont trouvé que le risque de faire un Kaposi était paradoxalement plus élevé chez les personnes ayant reçu pendant plusieurs mois de l'acyclovir (Zovirax®). Il parait donc prudent de n'utiliser l'acyclovir qu'en cas de nécessité et de limiter l'automédication dont il fait l'objet depuis plusieurs années.

B.4. Le zona survient chez 20 à 30% des patients séropositifs ; souvent, picotements ou douleurs suivis d'une éruption de vésicules au niveau du torse, parfois très prurigineuses ou douloureuses. En cas de localisation au niveau des yeux, une consultation en ophtalmologie devra être prise en urgence. Parfois, les douleurs peuvent persister au delà de la cicatrisation des vésicules. Les vésicules du zona peuvent être contaminantes pour les personnes, séropositives ou non, qui n'auraient jamais fait antérieurement de varicelle (5% de la population) : ces deux infections sont déclenchées par le même virus.

B.5. La gingivite récidivante, avec ulcérations buccales et aphtoïdes d'origine virale ou bactérienne, serait de mauvais pronostic. (0898)


Q-R 2

Q J'ai actuellement 52 ans, et depuis très longtemps, je souffre de dermite séborrhéique. Mais, depuis 6 ou 7 ans, les crises se sont amplifiées en intensité, et en nombre, situées au niveau du front, des ailes du nez, parfois sur les joues, sur la poitrine, de temps en temps, limitées au sternum.

Jusqu'a présent, j'ai utilisé comme traitement du Ketoderm crème à 2% , puis du Nizoral suspension sur les lésions (celles-ci se situant rarement sur le cuir chevelu). Je suis d'un tempérament très nerveux, stressé de par mes obligations professionnelles, stress que je maîtrise apparemment très bien. Il me semble que ces poussées de séborrhée coïncident avec le décès de mon fils de 14 ans, décédé d'une aplasie médullaire idiopathique en 1994, La greffe de moelle osseuse ayant échoué. D'autre part, j'ai subi trois sérologies VIH négatives. Je suis actuellement en bonne santé physique et d'un bon niveau sportif. Je vous serais reconnaissant si vous pouviez m'indiquer les traitements de fond, s'il en existe , ou autres traitements naturels ou non. Je travaille dans un local souvent surchauffé à causes des nombreux ordinateurs et la climatisation est insuffisante. Dans cette pièce, travaillent également une vingtaine de personnes dont 50% souffrent aussi de séborrhée à des degrés divers. Y a-t-il un lien de cause à effet ? Pouvez-vous me dire si la dermite séborrhéique est considérée comme une maladie psycho-somatique ? Existe-t-il des statistiques permettant de dire que la dermite séborrhéique est un symptôme, ayant donné lieu à une consultation médicale, qui a abouti à une sérologie VIH positive ?


R La sécheresse de la peau peut favoriser cette dermite ; ceci peut donc se produire, si des personnes travaillent dans des locaux surchauffés. Votre exemple en est d'ailleurs une illustration (pour ne pas dire une démonstration !). Ne pourrait-on pas parler de "maladie professionnelle" ... ! Qu'en pense la médecine du Travail ...

Certaines affections cutanées peuvent être d'origine psychosomatique ou être favorisées par l'état de stress de la personne. Cela s'applique à la dermite séborrhéique.
Il n'est pas exclu qu'il existe des statistiques faisant état d'un diagnostic d'infection à VIH suspecté sur la survenue d'une dermite séborrhéique. Il faudrait faire une recherche bibliographique sur Internet (type medline) ; actuellement, nous sommes débordés pour le faire (nous pouvons, si vous le souhaitez, vous transmettre les adresses e-mail pour le faire ; sachez, cependant, que les résumés d'articles que vous pourriez alors obtenir sont en langue anglaise).
Mais nous pouvons vous dire que nous avons déjà eu connaissance de cas de personnes où l'infection à VIH a été suspectée sur l'apparition d'une dermite séborrhéique et que le test a confirmé l'infection à VIH.

Concernant les traitements de la dermite séborrhéique, nous n'avons actuellement pas plus d'informations que celles publiées sur notre serveur Internet (<http://www.positifs.org/>), notamment dans le chapitre sur les atteintes cutanées de "Aspects médicaux du Sida" et dans les FAQ de notre serveur.

Nous aborderons enfin trois points pour compléter notre réponse à votre courrier.

Il faut savoir que la dermite séborrhéique est une affection qui n'est pas spécifique de l'infection à VIH et du Sida. Le corrolaire étant que la plupart des personnes ayant une dermite séborrhéique (et de surcroît, si elles l'ont depuis des années) n'ont pas à redouter d'être infectée par le VIH (sauf si elles ont eu des pratiques à risque de se faire contaminer par le Sida).

Certains se demandent s'il n'y a pas de corrélation entre la survenue de la dermite séborrhéique et l'allergie (l'allergie est plus fréquente chez les personnes séropositives que dans la population générale). Or, on a démontré chez les personnes séropositives (et cela semble être aussi le cas chez d'autres personnes, d'après notre expérience), qu'il existe une corrélation inverse entre les taux sérique en vitamine E et les immunoglobulines, qui sont augmentées au cours des phénomènes allergiques (IgE). Et nous avons constaté, chez des personnes séropositives, que l'utilisation de vitamine E (Toco 500, 2 à 3 comprimés par jour sur plusieurs mois) permettait d'améliorer le terrain allergique et, parfois, de faire disparaître la dermite séborrhéique (cela n'est pas suffisant pour constituer une démonstration ; il faudrait, là aussi, faire une recherche bibliographique).

Enfin, certaines formes de dermite séborrhéique peuvent être confondues avec du psoriasis qui est une affection auto-immune (cf. pour plus de précision notre serveur Internet sur cette affection auto-immune et les réflexions que nous avons développées sur les états d'allergie et d'auto-immunité).

----->> retour


.

© Copyright 2000, association POSITIFS, France.
--   Page maintained by Positifs.