Concernant la dermite séborrhéique, ce n'est pas
non plus un témoin d'un risque d'évolution de l'infection
à HIV. Il s'agit d'une manifestation cutanée souvent
récidivante. Parfois le traitement de l'allergie permet de
diminuer son intensité. On peut conseiller d'utiliser une
préparation dermatologique ichtyolée à 1% :
ichtyol à 5 g, glycérine à 5 g, alcool camphré
20g ou eau distillée 90 g, dermocuivre pommade : 1 tube,
ichtyol 0,35 g ou Keluol émulsion matin et soir après
nettoyage de la peau, en alternant avec des lotions antifongiques
type Daktarin lotion.
En cas d'échec, on peut envisager l'application d'un corticoïde
en évitant toute utilisation prolongée (en effet,
ce traitement est parfois très efficace, mais il risque d'entraîner
une dépendance) : Daktacort, une application matin et soir,
ou Ketoderm crème, 2 applications par jour, Tridésonit,
2 à 3 applications par jour pendant au maximum un mois.
Certains médecins conseillent aussi des shampooings à
base de goudron ou de pyrithione zinc, ou à base de disulfure
de sélénium, et la crème au ketoconazole à
1%. (1097)
Nous allons essayé de vous présenter une synthèse.
Pour plus de précisions, nous vous conseillons de consulter
F. ASPECTS MEDICAUX
DU SIDA sur notre serveur Internet (<http://www.positifs.org/>).
1/ Concernant les signes cutanés pouvant apparaître
au décours de la contamination par le virus VIH (primo-infection
par le VIH), ils peuvent se déclarer cliniquement 15
jours à 3 mois après la contamination, chez 20
à 50% des patients infectés. L'aspect clinique
est, dans ce cas, un syndrome mononucléosique analogue
au syndrome viral de la grippe ou de la rubéole. Les
signes sont, par ordre décroissant de fréquence
: adénopathies (= ganglions) cervicales et axillaires
(parfois splénomégalie), fièvre pouvant
persister un mois, sueurs, asthénie intense - voire des
malaises -, une anorexie, des courbatures, des myalgies, un
rash cutané - voire urticairien -, une dysphagie douloureuse,
des céphalées, des arthralgies, parfois une candidose
avec ulcérations buccales. Ces symptômes disparaissent
au bout de quelques semaines à un mois. Ces signes, totalement
non spécifiques, doivent faire évoquer le VIH
chez un sujet jeune, ayant des conduites à risque.
2/ Concernant les signes cutanés pouvant survenir
au cours de l'infection à VIH
A. Les manifestations cutanées mineures sont fréquentes.
A.1. La dermite seborrhéique serait un signe précoce
de l'infection à VIH. Elle se traduit par une desquamation
sur fond erythrosique (= rouge) parfois limitée au nez,
front, cuir chevelu ; parfois, localisation thoracique et aux
zones riches en glandes sébacées. Les récidives
sont fréquentes. Il semblerait qu'un champignon (Mallassezia
furfur) favorise cette dermite. Sa fréquence est la suivante
: 10% chez les asymptomatiques, 40% chez les ARC, 45 à
80% chez les SIDA.
A.2. Impétigo, folliculite, polydermite (staphylocoques,
streptocoques). Les lésions eczématiformes avec
tendance à l'impétiginisation sont fréquentes.
A.3. Candidoses buccales, génitales, péri-anales,
onyxis (fréquent). Rappelons que chez certains patients
(qu'ils soient d'ailleurs infectés ou non par le VIH),
les mycoses sont favorisées par certains facteurs, médicamenteux
en particulier. C'est le cas des antibiotiques et des antiseptiques
du carrefour aérodigestif (nez, gorge, etc.) ; ce qui
nécessite d'éviter les prescriptions injustifiées
de ces traitements (notamment par automédication). C'est
le cas aussi de l'hyperglycémie : diabète, intolérance
simple aux hydrates de carbone - voire même l'absorption
exagérée, transitoire, de certains sucres, des
anémies ferriprives, de l'insuffisance thyroïdienne.
Rappelons que la sécheresse buccale occasionnée
par la prise de somnifères, tranquillisants, neuroleptiques
et atrophiniques peut favoriser chez certains patients les mycoses
buccales et, secondairement, les localisations intestinales
et rectales.
A.4. Herpès buccal, génital ou péri-anal
: il ne prend de signification que lorsque les rechutes deviennent
plus fréquentes et la durée de la poussée
plus longue. Il serait plus fréquent quand les lymphocytes
T4 < 50/mm3 ou < 5%.
A.5. Le Molluscum contagiosum se traduit par une papule de
5 mm de diamètre ombiliquée, couleur peau saine,
donnant l'impression d'une lentille posée sur la peau,
localisée au visage. Son évolution se fait par
poussées.
A.6. Les aphtes peuvent occasionner des ulcérations
localisées au niveau de la cavité buccale, de
l'oesophage, mais aussi au niveau génital.
A.7. Le prurit et le prurigo. Le prurigo se traduit par l'apparition
répétée de lésions rouges, surmontées
d'une vésicule, souvent localisées au niveau des
jambes. Il est souvent très prurigineux. Parfois, il
est secondaire à une folliculite dont le traitement peut
améliorer le prurigo. Parfois, il est secondaire à
une parasitose intestinale (helminthiase) dont le diagnostic
repose sur l'examen parasitologique des selles. Plus rarement,
il peut survenir en cas de lymphome.
A.8. Ichtyose, hyperkératose.
A.9. Les dermatophytoses (surtout aux stades ARC et SIDA)
sont souvent associées aux mycoses. A.10. Le terrain
allergique est plus fréquent chez le sujet infecté
par le VIH que chez le sujet sain. Il est favorisé par
la carence en vitamine E .
A.11. Les infections à papillomavirus. Elles peuvent
être localisées au niveau du col de l'utérus,
du vagin, de la vulve, du périnée, du canal anal,
du pénis et de l'urètre. Les cancers ano-génitaux
(notamment les lésions cancéreuses intra-épithéliales
du col de l'utérus) associés à des papillomavirus
étant plus fréquents chez les personnes infectées
par le virus VIH, le diagnostic de ces infections est très
important. Son diagnostic est confirmé par les frottis,
la colposcopie ou l'anuscopie avec biopsies. Préventivement,
il importe que les femmes séropositives fassent régulièrement
des frottis cervico-vaginaux de dépistage ; au même
titre que cela est conseillé pour toutes les femmes,
mais avec une plus grande fréquence (tous les six mois).
B. Les manifestations cutanées majeures sont fréquentes.
B.1. La candidose oesophagienne, de par son retentissement,
est une forme majeure.
B.2. La leucoplasie chevelue serait spécifique du
VIH : il s'agit d'excroissances blanches striées, sur
le bord latéral de la langue. La cause en serait l'EBV
(Epstein-Barr virus) ou l'HPV (papillomavirus).
B.3. Sarcome de Kaposi : il s'agit d'une tumeur vasculaire
qui a été découverte avant l'apparition
de l'épidémie du SIDA. Chez les sujets non séropositifs,
elle est rare, touchant souvent des patients de plus de 60 ans,
donnant des localisations distales (membres inférieurs)
avec une certaine fréquence en Europe de l'Est, Centrale,
et le pourtour méditerranéen (populations d'origine
juive), engageant rarement le pronostic vital. En Afrique, il
existe à l'état endémique, surtout en Afrique
équatoriale (Zaïre, Ouganda, Kenya), et se manifeste
de façon plus agressive, touchant une population plus
jeune et avec des localisations viscérales et ganglionnaires.
Des sarcomes de Kaposi ont été décrits
chez des patients transplantés recevant des traitements
immunosuppresseurs. Ces formes sont à rapprocher de celles
observées fréquemment en association avec des
lymphomes. La forme la plus fréquente, actuellement,
est celle observée au cours du SIDA. Il est particulièrement
fréquent chez les homosexuels (21%), et plus rare chez
les personnes des autres groupes "à risque"
(moins de 3%). 80 à 90% des patients atteints sont homosexuels
(quelques cas ont aussi été décrits chez
des homosexuels non infectés par le VIH). Chez les femmes,
il est rare (3,5%) ; cette fréquence est plus élevée
en cas de partenaire bisexuel. Ce fut, au début de l'épidémie,
la première manifestation du SIDA chez près de
40% des homosexuels ; depuis 1989, sa prévalence comme
signe inaugural du Sida a diminué. Maintenant, il survient
surtout à des stades plus avancés de la maladie,
souvent chez des personnes ayant des CD4 inférieurs à
200/mm3, avec une plus grande
fréquence des formes pulmonaires graves et des atteintes
cutanées étendues avec oedèmes importants.
Plusieurs facteurs joueraient un rôle dans l'apparition
du sarcome de Kaposi : l'herpès virus HHV8 (qui a été
aussi retrouvé dans deux autres pathologies touchant
les personnes séropositives : le lymphome BCBL et la
maladie de Castelman), la protéine tat du VIH (qui agirait
en synergie avec le bêta-FGF), des cytokines ou facteurs
de croissance participant à la prolifération et
à la différenciation cellulaire (dont l'activité
serait stimulée par tat et qui sont synthétisées
par les cellules du sarcome de Kaposi) comme le TNF alpha, l'interleukine
1, l'interleukine 6, le PDGF (Platelet Derived Growth Factor),
le TGF bêta (Transforming Growth Factor), le bêta-FGF
(Fibroblast Growth Factor Basic), l'oncostatin M.
Les symptômes du sarcome de Kaposi dans le cadre
du SIDA :
Souvent, il s'agit d'une forme localisée, peu extensive
à son début, dans 30% des cas : papule ou nodule
infiltré rouge, violacé ou marron, évoluant
vers des lésions en plaque parfois douloureuses ; souvent
localisé aux extrémités, notamment plante
des pieds, au début, puis sur toutes les parties du corps.
Les atteintes muqueuses, notamment du palais dans plus de 50
% des cas, peuvent être inaugurales. Souvent le diagnostic
est évident : la biopsie cutanée permet d'apporter
le diagnostic histologique de certitude. Il existe des formes
avec localisations viscérales multiples dans plus de
50% des cas, souvent associées à d'autres affections
opportunistes : notamment pulmonaires ou digestives ; dans les
formes très évoluées on peut noter un lympho-oedème
de la face ou des membres inférieurs. Seules les formes
pulmonaires, ou les exceptionnelles formes digestives hémorragiques,
peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Des complications
dues à certains traitements peuvent mettre aussi en jeu
le pronostic vital. Le pronostic est aussi parfois modifié
en raison des troubles de l'alimentation, secondaires à
des atteintes buccales parfois importantes.
L'aspect histologique est très spécifique :
la biopsie montre une prolifération angiomateuse et fibroblastique
(cellules fusiformes "spindle cells") entrecoupée
de fentes vasculaires et de dépôts d'hémosidérine.
Rappelons enfin qu'à l'occasion d'études rétrospectives
pour analyser l'effet sur le Kaposi des trois antiviraux utilisés
pour traiter l'herpès, certaines études ont trouvé
que le risque de faire un Kaposi était paradoxalement
plus élevé chez les personnes ayant reçu
pendant plusieurs mois de l'acyclovir (Zovirax®). Il parait
donc prudent de n'utiliser l'acyclovir qu'en cas de nécessité
et de limiter l'automédication dont il fait l'objet depuis
plusieurs années.
B.4. Le zona survient chez 20 à 30% des patients séropositifs
; souvent, picotements ou douleurs suivis d'une éruption
de vésicules au niveau du torse, parfois très
prurigineuses ou douloureuses. En cas de localisation au niveau
des yeux, une consultation en ophtalmologie devra être
prise en urgence. Parfois, les douleurs peuvent persister au
delà de la cicatrisation des vésicules. Les vésicules
du zona peuvent être contaminantes pour les personnes,
séropositives ou non, qui n'auraient jamais fait antérieurement
de varicelle (5% de la population) : ces deux infections sont
déclenchées par le même virus.
B.5. La gingivite récidivante, avec ulcérations
buccales et aphtoïdes d'origine virale ou bactérienne,
serait de mauvais pronostic. (0898)
Q-R 2
Q J'ai actuellement 52 ans, et depuis très longtemps,
je souffre de dermite séborrhéique. Mais, depuis
6 ou 7 ans, les crises se sont amplifiées en intensité,
et en nombre, situées au niveau du front, des ailes du
nez, parfois sur les joues, sur la poitrine, de temps en temps,
limitées au sternum.
Jusqu'a présent, j'ai utilisé comme traitement
du Ketoderm crème à 2% , puis du Nizoral suspension
sur les lésions (celles-ci se situant rarement sur le
cuir chevelu). Je suis d'un tempérament très nerveux,
stressé de par mes obligations professionnelles, stress
que je maîtrise apparemment très bien. Il me semble
que ces poussées de séborrhée coïncident
avec le décès de mon fils de 14 ans, décédé
d'une aplasie médullaire idiopathique en 1994, La greffe
de moelle osseuse ayant échoué. D'autre part,
j'ai subi trois sérologies VIH négatives. Je suis
actuellement en bonne santé physique et d'un bon niveau
sportif. Je vous serais reconnaissant si vous pouviez m'indiquer
les traitements de fond, s'il en existe , ou autres traitements
naturels ou non. Je travaille dans un local souvent surchauffé
à causes des nombreux ordinateurs et la climatisation
est insuffisante. Dans cette pièce, travaillent également
une vingtaine de personnes dont 50% souffrent aussi de séborrhée
à des degrés divers. Y a-t-il un lien de cause
à effet ? Pouvez-vous me dire si la dermite séborrhéique
est considérée comme une maladie psycho-somatique
? Existe-t-il des statistiques permettant de dire que la dermite
séborrhéique est un symptôme, ayant donné
lieu à une consultation médicale, qui a abouti
à une sérologie VIH positive ?
R La sécheresse de la peau peut favoriser cette
dermite ; ceci peut donc se produire, si des personnes travaillent
dans des locaux surchauffés. Votre exemple en est d'ailleurs
une illustration (pour ne pas dire une démonstration
!). Ne pourrait-on pas parler de "maladie professionnelle"
... ! Qu'en pense la médecine du Travail ...
Certaines affections cutanées peuvent être d'origine
psychosomatique ou être favorisées par l'état
de stress de la personne. Cela s'applique à la dermite
séborrhéique.
Il n'est pas exclu qu'il existe
des statistiques faisant état d'un diagnostic d'infection
à VIH suspecté sur la survenue d'une dermite séborrhéique.
Il faudrait faire une recherche bibliographique sur Internet
(type medline) ; actuellement, nous sommes débordés
pour le faire (nous pouvons, si vous le souhaitez, vous transmettre
les adresses e-mail pour le faire ; sachez, cependant, que les
résumés d'articles que vous pourriez alors obtenir
sont en langue anglaise).
Mais nous pouvons vous dire que
nous avons déjà eu connaissance de cas de personnes
où l'infection à VIH a été suspectée
sur l'apparition d'une dermite séborrhéique et
que le test a confirmé l'infection à VIH.
Concernant les traitements de la dermite séborrhéique,
nous n'avons actuellement pas plus d'informations que celles
publiées sur notre serveur Internet (<http://www.positifs.org/>),
notamment dans le chapitre sur les
atteintes cutanées de "Aspects médicaux
du Sida" et dans les FAQ de notre serveur.
Nous aborderons enfin trois points pour compléter
notre réponse à votre courrier.
Il faut savoir que la dermite séborrhéique
est une affection qui n'est pas spécifique de l'infection
à VIH et du Sida. Le corrolaire étant que la plupart
des personnes ayant une dermite séborrhéique (et
de surcroît, si elles l'ont depuis des années)
n'ont pas à redouter d'être infectée par
le VIH (sauf si elles ont eu des pratiques à risque de
se faire contaminer par le Sida).
Certains se demandent s'il n'y a pas de corrélation
entre la survenue de la dermite séborrhéique et
l'allergie (l'allergie est plus fréquente chez les personnes
séropositives que dans la population générale).
Or, on a démontré chez les personnes séropositives
(et cela semble être aussi le cas chez d'autres personnes,
d'après notre expérience), qu'il existe une corrélation
inverse entre les taux sérique en vitamine E et les immunoglobulines,
qui sont augmentées au cours des phénomènes
allergiques (IgE). Et nous avons constaté, chez des personnes
séropositives, que l'utilisation de vitamine E (Toco
500, 2 à 3 comprimés par jour sur plusieurs mois)
permettait d'améliorer le terrain allergique et, parfois,
de faire disparaître la dermite séborrhéique
(cela n'est pas suffisant pour constituer une démonstration
; il faudrait, là aussi, faire une recherche bibliographique).
Enfin, certaines formes de dermite séborrhéique
peuvent être confondues avec du psoriasis qui est une
affection auto-immune (cf. pour plus de précision notre
serveur Internet sur cette affection auto-immune et les
réflexions que nous avons développées sur
les états d'allergie et d'auto-immunité).
----->> retour